Pour une Nouvelle Ambition Industrielle Française

Dans presque tous les domaines, la crise du coronavirus, aura eu un effet de loupe sur les forces et faiblesses françaises. Nos points forts nous ont permis de tenir. Nos points faibles ont gravement compliqué la tâche de chacun. 

Ce constat s’applique particulièrement bien à notre industrie : la crise sanitaire a révélé son caractère lacunaire et notre dépendance industrielle et technologique vis-à-vis de l’étranger, d’un étranger lointain au surplus, sur des segments critiques de la production pharmaceutique et médicale (aspirine, principes actifs pour les tests, machines et tissus non tissés pour les masques etc..). Ce constat particulièrement sévère dans le domaine de la santé vaut pour d’autres secteurs industriels.

Et si les réponses apportées au manque de moyens techniques et la réactivité face à la crise ont été impressionnantes à l’hôpital, elles ont été décevantes, pour dire le moins, dans le domaine industriel: le manque de capacité à fabriquer ou approvisionner rapidement des produits ou des composants stratégiques restera comme un souvenir cuisant de cette crise. 


La crise sanitaire a aussi révélé le manque d’anticipation et de préparation à un événement de nature à paralyser les flux et l’activité économique. A ainsi été mise en lumière la faiblesse de l’Etat stratège. D’où le retour en force de cet impensé des années 2000 : la souveraineté  industrielle et  économique. 

Nous nous retrouvons au XXIème siècle devant des problématiques que la France a déjà connues. Comment sécuriser la réponse de notre économie à la demande de produits industriels ? Comment assurer notre souveraineté stratégique et réduire nos déficits commerciaux massifs ? Comment concilier ces objectifs avec les ambitions environnementales, le cadre et la stratégie de l’Union Européenne ?

L’impératif industriel des Trente Glorieuses revient sur le devant de la scène, comme l’a constaté le Premier ministre dans son discours de politique générale devant le Parlement. Mais il faut trouver un nouvel équilibre entre l’initiative privée et la stimulation publique, entre les initiatives nationales et le cadre européen. Cet équilibre dépend moins, à nos yeux, de l’addition d’outils ou de moyens nouveaux que d’un alignement fort des multiples interventions publiques concourant à la politique industrielle, qui constituent sinon autant d’injonctions contradictoires pour les acteurs privés. 

Des moyens, le gouvernement en annonce de nouveaux, plutôt bien conçus dans l’ensemble : plans sectoriels (aéronautique, automobile) ; suppression d’impôts nuisibles à l’investissement et l’emploi (impôts de production). Manque encore un dispositif complet de soutien aux fonds propres des entreprises, particulièrement nécessaire pour les entreprises industrielles qui sont confrontés à de gros besoins d’investissements de numérisation et de robotisation. Les travaux en cours devraient se traduire en mesures à l’automne, dans un cadre auquel les Gracques ont porté attention à travers diverses propositions.

On reviendra sur ces différentes contributions à la relance de l’impératif industriel.

Mais un point essentiel nous semble être leur cohérence et l’alignement de l’ensemble des interventions publiques dans une seule démarche et avec une ambition centrale : la réindustrialisation. Centrale parce que créatrice de valeur ajoutée et d’emplois dans les territoires, et facteur clef de la souveraineté économique.

La désindustrialisation française depuis une vingtaine d’années a été si brutale, si subie et si caractéristique de l’impuissance publique, qu’il importe d’en rappeler l’ampleur et d’en tirer les leçons pour caractériser ce qu’est aujourd’hui le nouvel impératif industriel français (I).

De là découlent les objectifs d’une stratégie industrielle moderne, axée sur les objectifs clés de compétitivité, d’innovation et de souveraineté, avec des moyens de mise en œuvre qui supposent un aggiornamento complet de l’organisation publique. Seul un changement profond pourrait signifier le retour d’un Etat stratège, enfin aligné avec toutes les parties prenantes  (II). 

C’est alors que pourront être engagées avec quelque efficacité les principales actions permettant d’aligner les politiques publiques sur les priorités essentielles et permanentes de la politique industrielle: la compétitivité et l’innovation, en libérant les entreprises des boulets qui les handicapent et qui pénalisent en même temps l’emploi et l’avenir de nos territoires (III).


L’intégralité de la note ci-dessous :