La Nuit de l’Europe

Retour sur la Nuit de l’Europe qui s’est tenue le 4 avril à Sciences Po en partenariat avec Terra Nova, la Fondation Jean Jaurès, le grand Continent, Les Echos, le Crayon et Arte, et auquel plus de 2000 étudiants et externes ont participé.

Quelques replays ci dessous :

Moderniser l’Etat pour de vrai

Tant que l’Etat hésitera à se numériser, il refusera de fait de se moderniser… et les simples citoyens attendront. Jusqu’à quand demande Bernard Spitz ?

Il y a un impensé dans la politique en France depuis longtemps. C’est la réforme de notre Etat. Un angle mort paradoxal par rapport à la promesse d’une nouvelle génération au pouvoir, celle dont on aurait pensé qu’elle accélérerait la modernisation, notamment numérique, de la gestion publique, comme dans tant d’autres pays…

La campagne électorale de 2017 avec François Fillon s’était centrée sur le nombre de fonctionnaires à supprimer, une mauvaise entrée en matière. Un « comité action publique 2022 » fut bien créé pour penser la transformation, mais ses conclusions finirent dans les broyeuses de l’exécutif. La seule mesure, symbolique bien que sans portée profonde sur notre Etat, fut la suppression de l’ENA créée par le général de Gaulle, que personne ne réclamait.

Le second quinquennat sera-t-il l’occasion de boucher cet angle mort pour atteindre un Etat plus efficace et plus frugal ? C’est-à-dire qui encadre, soutienne, évalue et récompense ses serviteurs, comme toute organisation professionnelle.

Qui offre à nos concitoyens le niveau de protection sociale et de sécurité auxquelles ils aspirent, tout en les libérant d’une oppressante bureaucratie. Et qui desserre une contrainte financière d’autant plus insupportable que nous dépensons plus que les autres pour moins de résultats, au prix d’une dette qui finira par nous exploser, un jour pas si lointain, à la figure.

La priorité : les simples citoyens

Plus le temps passe, moins la promesse de l’Etat est tenue, une déception que confirment les sondages d’opinion. Santé et éducation souffrent. Les conditions de travail de la police et de la justice sont médiocres. La décentralisation est en rade, le logement sinistré. Et l’enfer réglementaire écrase ses usagers, comme les agriculteurs l’ont rappelé. Comment s’y attaquer ?

Au-delà d’un projet de loi de simplification pour les TPE et PME promis au printemps, la priorité devrait concerner les simples citoyens. Le permis de conduire dématérialisé a été un bon signal. Il y avait d’autres indices prometteurs dans la déclaration de politique générale de Gabriel Attal : simplification, réquisition, évaluation, pénalisation des incivilités (les rendez-vous médicaux non honorés), suppression des instances fantômes… Autant de principes concrets et de bon sens.

Il y manque hélas la seule action centrale qui permettrait de concilier efficacité, réduction de coûts et justice sociale. Celle qui mettrait les nouvelles technologies – dont l’IA – au service de tous. Celle qui supprimerait les milliers de procédures, formulaires et bureaux chargés de leur application, en les remplaçant par le transfert automatique des prestations sociales et de solidarité à leur bénéficiaire, sans démarches à accomplir ni normes incompréhensibles à respecter. Celle qui adopterait le principe « dites-le nous une seule fois », qui empêche l’administration de redemander une donnée qu’elle a déjà.

Mettre les nouvelles technologies au service de tous

C’est possible, cela existe déjà ailleurs comme en Estonie , grâce à l’identité électronique unique, universelle et obligatoire de chaque citoyen. Aussi simple que la carte vitale, aussi sécurisée que la carte d’identité, aussi banalisée que l’identifiant national de santé, elle pourrait rendre notre administration accessible, égalitaire et aussi efficace que les plateformes numériques de la vie quotidienne. Le personnel administratif ainsi libéré irait alors au contact des Français qui en ont besoin.

Conjuguée à un vaste plan de départs volontaires, cette réforme-là permettrait de moderniser notre Etat vite et bien, plutôt que d’attendre le moment où des coupes aveugles seront imposées par le poids de notre dette. Mais voilà, l’archaïsme a la peau dure. On en est encore à parler « d’expérimenter le préremplissage des formulaires » de demande de RSA. Ça fera bien rire les Estoniens ! Alors que comme eux, il faut faire l’inverse : automatiser les versements et supprimer les formulaires !

Tant que l’Etat hésitera à se numériser, il refusera de fait de se moderniser… et les simples citoyens attendront. Jusqu’à quand ?

Bernard Spitz

Article à lire dans Les Echos

Rendons le projet européen désirable

Le 4 avril prochain, à l’occasion de « La nuit de l’Europe » en partenariat avec « Les Echos », le think tank Les Gracques souhaite enrichir le débat public et porter une nouvelle vision d’un projet européen en cette année d’élections.

Les Gracques répondent toujours présent aux rendez-vous avec L’Europe. Aux élections de 2019, nous avions rempli le grand amphi de la Sorbonne avec « Le sommet des réformistes ». Le 4 avril prochain avec Sciences Po, nous organisons « La Nuit de l’Europe » en partenariat avec Terra Nova, la Fondation Jean-Jaurès, le Grand Continent, « Les Echos », Arte, le Crayon et la participation d’une vingtaine de think tanks européens.

Etudiants, associations, chercheurs, personnalités du monde de l’entreprise, de la politique et de la culture venus de tout le continent vont se mobiliser le temps d’une nuit inspirante, positive et festive. Pour faire partager au plus grand nombre, notamment aux jeunes, le désir d’Europe, à deux mois d’élections cruciales pour son avenir. Pour que ce scrutin soit l’occasion du sursaut, à un moment où les défis n’ont jamais été aussi forts.

A l’extérieur, c’est le défi du Global South, des BRICS , des démocratures, de l’islam radical, de tous ceux que réunit leur rejet de l’Occident. Au sein du monde occidental, c’est le défi d’une relation atlantique en risque de fracture en cas d’élection de Donald Trump.

Europe affaiblie

L’Europe a perdu de sa crédibilité géostratégique au niveau mondial. Elle est économiquement concurrencée par la puissance financière et technologique américaine. Elle est commercialement ciblée par une Chine à la recherche de débouchés pour ses exportations. Elle se retrouve divisée face à une guerre à ses frontières qui déstabilise ses chaînes de production et menace la souveraineté des Etats qui la composent.

Et elle est affaiblie dans chaque Etat par le jeu combiné des réseaux sociaux, des cyberattaques, des idéologies radicales et des déstabilisations étrangères. « Les Ingénieurs du chaos », si bien décrits par Giuliano da Empoli sont à l’oeuvre…

Face à de tels défis, l’Europe a du mal à privilégier les choix collectifs. A défaut de produire assez de munitions ou de renouvelables, elle accumule des normes suscitant le mécontentement, principal carburant avec l’immigration de la montée populiste.

Paix entre les Etats

Et pourtant, l’Union européenne est la plus belle aventure de nos générations. Grâce à elle, nous bénéficions de l’un des plus hauts niveaux de vie et de soin du monde, de la paix entre nos Etats et d’un jeu démocratique longtemps vécus comme intangible, sans penser qu’un retour en arrière était toujours possible. 

Si nous voulons conserver cet acquis pour les générations futures et conserver à l’Europe une place majeure sur la carte du monde, il nous faut faire des choix. En matière militaire, énergétique, d’éducation et de recherche, digitale et technologique, monétaire et assurantielle…

Hélas, ce n’est pas ce dont nous parle cette campagne . Elle est saturée par des considérations de politique intérieure. Elle ajoute à la polarisation de la vie politique, sans enrichir le débat public des propositions et de la vision d’un projet européen. A l’opposé de ce positionnement national, nous avons choisi de discuter librement de ce qui rendrait le projet européen souhaitable et désirable.

Nombreux intervenants

Envie d’Europe, avec des Premiers ministres, des chefs d’entreprise, des artistes, des intellectuels, des représentants de quinze pays, une vingtaine de think tanks européens… De Jacques Attali à Robert Menasse, du chancelier autrichien Nehammer au Premier ministre d’Albanie et artiste Edi Rama, d’Enrico Letta à Stéphane Boujnah, tous présents le 4 avril pour débattre, échanger, proposer, convaincre…

Pour discuter de l’Europe face à la mondialisation ou à la montée populiste, pour s’interroger sur comment être européen… Des controverses, un bilan de l’action de l’Union, une table ronde autour de l’imaginaire européen, de la musique, des arts plastiques : voilà tout ce qui sera au rendez-vous de « La nuit de l’Europe » . Pour rêver, le temps d’un soir, d’une autre Europe…

Les membres du think tank Les Gracques.

Article complet à retrouver dans les Echos.